Prendre Corps

Prendre Corps

Lille - 28 Août 2020, quelques minutes avant le grand départ. Je m’apprête à partir un mois sans sac à dos faire un tour de Gaule culinaire. Je me rappelle Noham me disant : « J’ai été surpris par le choix de ton sujet étant donné ton histoire familiale. Mais c’est une bonne chose. » Moi aussi, comme Obélix, je suis tombée dans la marmite quand j’étais petite. Mon père est restaurateur. Mon grand père était restaurateur. Mon arrière grand-père était restaurateur. Ma grand-mère, Monique, tenait l’hôtel familial.

QUI JE SUIS MOI ? Moi, j’aime manger. 

Alors en plein deuil amoureux et au fil des rencontres, je me suis interrogée sur le lien entre féminité, désir et nourriture, les rapports ambigus ou destructeurs entre chair féminine et bonne chère, et de manière plus inattendue, sur le lien entre le deuil amoureux et la viande...
Dans une époque devenue si sensible au slow food, si attentive aux tendances culinaires, nous nous voilons trop souvent la face sur la place de la femme dans l'organisation de cet acte essentiel qui est celui de (se) nourrir.
Quel rapport entre une entrecôte et le patriarcat ? Si prendre l'espace, c'est prendre la place, alors où sont passées les Maïté, ces femmes aux corps ne répondant pas à la norme ? Ces ogresses avides de bonne chère à l'ère des foodistas défilant sur les plateaux de Paris Première ? Et quand nous mangeons, qui nous mangeons ? Que dit de nous ce que nous mangeons ? Aime-t-on comme on mange ?
De ces questionnements est né Prendre Corps. Un spectacle performatif durant lequel je compose, accompagnée d'un musicien live, avec les codes sociaux et les symboles liés à la nourriture. Selon moi, c'est précisément un nœud entre l'intime et le politique.

J'ai un grand appétit : je suis quelqu'un qui a beaucoup de désirs et manger et désirer, c'est très proche pour moi.